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Un Trek de survie qui aurait pu me tuer

Publié le par Marion Nette

Car les treks de survie, c'est ma soupape de sureté, quand je suis à bout.​

Je pars dans les bois pour plusieurs jours, avec le minimum pour survivre, un couteau, une gourde, mon hamac, de quoi faire du feu, et je vis au jour le jour, face à moi même.

Et ça marche, ça m'aide, ça me fait réfléchir utile, ça me fait penser autrement. La faim, le stress, l'inconnu, tout ça me force à laisser de coté toutes mes peurs, mes angoisses pour me recentrer sur moi​. Je l'ai déjà fait depuis que je suis sur Twitter. Ça s'est toujours bien passé. Quoique l'on peut pas dire que ça c'est mal passé, je ne suis pas morte, mais c'est passé prés.

J'ai posté une photo sur FB, et je me suis rendu compte de la stupidité de mon geste. Je me suis détestée, insultée, j'ai tout masqué et je suis partie.

A l'aventure, j'ai posé la voiture au pied d'un pare feu et j'ai marché, marché jusqu'au point de non retour. L'endroit où tu sais que tu peux revenir sans problème dans un horaire décent... et je l'ai dépassé sans l'ombre d'une hésitation.

Faire un trek survie, en cette saison, ce n'est pas l'idéal, il y a beaucoup moins à manger qu'en automne, mais on trouve quand même. Il ne faut pas marcher pour marcher, mais marcher en vue d'avancer le plus longtemps possible. Manger avant d'avoir faim, boire avant d'avoir soif, faire les réserves dont on pense avoir besoin, économiser ses forces, lire la forêt, ne pas lutter contre elle car elle gagnera.

La première nuit fut tranquille, après un repas plutôt frugal et une infusion de menthe, j'ai accroché mon hamac entre 2 arbres, en hauteur, 2m au minimum. en effet, il y a pas mal de sanglier dans le médoc, qui se déplacent presque exclusivement la nuit. Être sur le chemin d'un solitaire pourrait éventuellement le contrarier et je ne suis pas de taille à contrer un bestiau de + de 100 kg, sans compter les bestioles qui fourmillent dans la mousse.

Le lendemain, je me suis dirigé vers la mer, sans savoir si je l'atteindrais, mais ce n'était pas grave. Le médoc n'est pas très grand, Il est nécessaire de traverser quelques routes et ma plus belle découverte fut de trouver, sur le bord de la route, un endroit qui avait dû servir d'aire de pique nique et ou les gens avait mangé du melon et jeter leurs restes. Plusieurs graines avaient germé et donné 2 petits melons. Quand tu trouve ça, c'est comme si tu gagnait au loto. J'ai pu pécher 3 écrevisses aussi, dans un trou d'eau, avec une branche d'arbre bien feuillu. Ça marche plutôt bien, mais il faut être rapide.

Le paysage changeait, plus de résineux et moins de feuillus, sol plus sableux, plus sec. Le soleil cognait fort aussi. Et l'ombre sous un chêne n'est pas la même que sous un pin.

Le soir venu, installation du camp, feu, repas, et montage du hamac, et c'est là que ça a foiré.

Le premier coté fait (la tête), je monte à une arbre voisin afin de faire le deuxième coté (les pieds). Corde entre les dents, je monte. A hauteur voulu, j'attrape une branche et j'imprime un léger mouvement de balancier pour hisser mes jambes sur une autre branche et m'y agripper afin de libérer mes mains. Sauf que la corde que j'avais toujours entre les dents s'est accroché et s'est arraché de ma bouche. Ça m'a surpris et j'ai lâché une main, la plus près du tronc, celle qui assurait la solidité de la branche. Tout mon poids, ajouté à l'effet de balancier montant, qui, pour ceux qui connaissent les lois de la physique, a accentué le dit poids, supporté par une seule main placé beaucoup trop loin de la base de la branche, a un effet désastreux sur sa solidité.

La branche a cassé net. La chute m'a semblé interminable. Ballotée par successivement par 2 branches plus basse, sans avoir la possibilité de m'agripper ou de me redresser, je suis tombée comme une pierre, m'écrasant plus bas sur un sol imparfait, sur le coté gauche du dos.

J'ai entendu hurler, avant de me rendre compte que c'était moi qui hurlais, mais aucun son ne sortait de ma bouche. Le souffle coupé par le choc, je cherchais juste l'air, comme un poisson hors de son bocal.

Tout un tas d'idées bizarres te traversent l'esprit en ces moments là. La 1ére, avant de toucher le sol, c'est :

" - ça y est, Je vais mourir "

Puis le choc, la douleur, et l'esprit échafaude tout un tas de scénarios sur "l'après" :

" - Je suis vivante ? Je suis paralysée ? Je me suis cassé quoi ? J'ai mal. Je vais m'en sortir ? Quelle conne je fait, putain. Je vais pouvoir marcher ? revenir à ma voiture ? je vais mourir ici. Personne ne me trouvera. Je ne serais pas au boulot, mais personne ne me trouvera. je vais mourir. je vais mourir... "

Se calmer, recommencer à respirer, se calmer, la douleur devient supportable, recommencer à réfléchir.

Après ma chute, j'ai rebondi sur le sol et je me suis retrouvé sur le coté, le visage dans le sable.

Je suis resté comme ça un grand moment, sans oser bouger, avec une main géante qui me serrait le dos. Le premier mouvement que j'ai fait, c'est remuer les doigts de pieds. Un soulagement immense m'a envahi. Petit à petit j'ai bougé tout ce qu'il m'était possible de bouger. Ayant déjà eu quelques problèmes involontaires de violence par le passé, il m'a été facile de diagnostiquer approximativement ce que je pouvait avoir.

L'urgence de l'instant, c'est où et comment je m'installe ? la nuit commençait à tomber et mon hamac pendait lamentablement au premier arbre, hors de question de le décrocher ou d'accrocher l'autre extrémité. Après un inventaire des mouvements que je pouvais faire ou pas sans me lever, la première tentative s'étant soldé par un échec. Je décidais d'amasser le plus d'aiguille de pin contre un tronc de pin couché, qui me fera un matelas de fortune et ne me semblait pas être dans un passage de cochon. Il me restait un melon qui sera mon repas du soir, et il faudra que ça aille comme ça.

La nuit s'est passé, presque sans problème, je dis presque car une envie de pipi m'a réveillé en pleine nuit, et ne pouvant pas me déplacer pour plusieurs raisons, j'ai du me résoudre à me faire dessus, comptant sur le matelas d'aiguille de pin pour absorber l'humidité. Le déplacement minimum m'a permis de me rendormir sans trop de difficulté.

Le jour m'a réveillé, j'ai fait un rapide état des lieux sur ma santé. Courbaturée, une pointe dans le dos, coté gauche, sale, souillée, la bouche pâteuse, soif, faim.. en forme quoi.

2ème tentative de levée, réussi cette fois, plus d'étourdissement, douleur supportable à condition de garder le dos droit.

Situation : en pleine foret et à vue de nez une quinzaine de km de la 1ère route, rien à manger, très peu à boire et un dilemme à résoudre. Soit aller à la première route plein ouest, sachant que la route n'est pas très fréquenté ou faire un peu plus de km et monter vers le nord vers une route d'accès à la plage ou je suis sure qu'il y aura du monde.

En réfléchissant à ça, j'ai enlevé mon short et ma culotte, j'ai sacrifié un peu d'eau pour laver ma culotte et ma minette afin d'éviter les irritations dû à l'urine et j'ai mis à sécher.

J'ai préparé un feu afin de préparer une infusion d'aiguille de pin fraiche avec le reste de mon eau, et en priant secrètement de pouvoir trouver quelque chose sur ma route, quelque chose qui soit facile à ramasser ou à attraper. J'ai laissé mon hamac sur place, ne pouvant pas le décrocher, je l'ai quand même fixé le long de l'arbre pour éviter l'effet voile. J'ai rangé, éteint soigneusement le feu, enfilé ma culotte séchée et je suis partie, vers le nord.

Le trajet n'a pas été facile, mais plus court que je le pensais, j'avançais en faisant le minimum d'effort, de manière méthodique et la découverte d'une ferme sur mon chemin m'a grandement aidé. j'aurais juste dû remettre mon short, qui finissait de sécher sur mon sac à dos, avant de me présenter au fermier. j'ai raconté brièvement mes mésaventures, Il m'a offert à boire et à manger et j'ai dû insister pour qu'il ne m'emmène pas à l'hôpital mais à ma voiture. Cela dit, je faisais celle qui n'avait pas mal mais je serrais les dents quand même. J'ai également profité de sa salle de bain pour me mettre une tête potable. c'était hors de question de faire peur à ma Mamounette en rentrant.

Je suis rentré chez moi, pensant même aller travailler le lendemain. la suite, vous la connaissez, une nuit dans le confort et blocage total au réveil.

Toubib, radio et verdict : 2 côtes fêlées et un trauma intercostal... et ça douille. je l'ai tweeté d'ailleurs. La côte, par elle même ne fait pas mal, c'est le tissus de muscles qui l'entoure, et quand tu fait un mouvement qui pique, tout le haut du corps se met en gainage, y compris les muscles meurtris. Et tu prend une apnée de 5 secondes qui fait un mal de chien et, quand ça se calme, tu n'ose plus bouger de peur de perdre quelque chose.

Pour en revenir à la radio, après une discussion avec Greg, avant d'y aller, j'ai mis un haut de maillot, et j'ai eu le nez creux sur ce coup là, sinon, je me retrouvais en culotte devant la plaque, j'ai pu garder mon maillot car pas d'agrafes ni de baleine, mais j'ai du tomber la robe. j'avais vu que mon trauma avait été dû à une racine affleurante, J'ai appris aussi que l'épicentre du trauma est situé à 2 cm de ma colonne vertébrale. En tombant dessus, j'aurais eu la possibilité de me fracturer une ou deux vertèbres, ce qui aurait eu pour consequence une paraplégie et la certitude de mourir au milieu de la foret. La chasse est fermé, absolument personne ne passe par là. Mon ultime solution pour être sauvé aurait été d'allumer un feu contrôlé. En ces périodes de sècheresse, les pompiers sont sur les dents et seraient venu voir. Mais aurais-je pu pouvoir le faire ? sans l'usage de mes jambes ? je ne sais pas. j'essaierais un jour.

Oui, la vie peut s'arrêter comme ça, aussi simplement qu'une branche qui casse.

Que ça me serve de leçon, à croire que je n'en ai pas assez eu.

Gros bisous.

 

Marion

 

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